Cette période de l’année correspond à l’archétype du Fou, à la zone de l’articulation de la mâchoire.
Comme l’automne qui ramène les couleurs dans les racines des arbres et révèle la palette de teintes et la structure des feuilles, le Fou-poète nous relie et nous connecte aux flots d’inspirations qui viennent de l’invisible.
L’articulation de la mâchoire est comme une source d’où s’écoulent les flots d’inspirations… petits ruisseaux ou cascades impétueuses. Ce qui nous vient du Fou est tendre, raffiné… et pourtant puissant comme l’immensité du ciel, des tourbillons cosmiques qui sont la sources des mots vrais qui peuvent nous traverser.
C’est l’espace et le temps de recevoir sans faux-semblants ces impulsions, sans restriction, sans chercher de cohérence, quitte à ce qu’elles nous bousculent dans nos certitudes… c’est une fonction sacrée comme l’est celle du fou au côté du roi, comme celle du chaman dans la tribu : le Fou est l’aspect spontané du Poète, son insouciance est essentielle à l’équilibre de tout notre être et de notre corps.
Cette étape inspirée, lâchée, parfois bousculante, parfois émerveillante, est une porte : la porte de la récolte. Lorsque nos carapaces ont été secouées de l’inutile sérieux, nous pouvons recevoir les fruits de nos efforts passés, amplifiés par l’abondance du cosmos qui nous restitue notre part, au-delà de ce que notre imaginaire pourrait concevoir.
Une grande puissance peut naître de ces mots, mêmes s’ils sont petits : comme les « chuchoteurs » qui savent les mots qui vont apaiser et mobiliser la puissance du cheval, en nous, les inspirations du poète-fou peuvent mettre en mouvement le dragon de notre énergie vitale, en lui donnant un but élevé.
Cet mise en mouvement ne se voit pas forcément instantanément : dans le cycle de l’année, c’est au printemps que nous verrons les forces chevaleresques se dresser, et elles le seront en grande partie grâce aux inspirations reçues comme de bonnes graines avant l’hiver.
C’est donc une période privilégiée où il est précieux de pouvoir se mettre à l’écoute de la poésie du monde, non seulement pour récolter les fruits de l’année passée, mais aussi pour donner une direction à notre future poussée de sève.
Le Fou et l’anatomie
Remarquons combien l’articulation de la mâchoire dans son anatomie appuie les images que nous avons donné de la fonction du fou :
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d’abord, elle prend appui sur le crâne près de l’oreille interne : elle en est le prolongement, comme une parole qui se déploie depuis l’écoute des mystères de l’univers… c’est, lové au creux du rocher de notre crâne, un rond mobile, comme une source d’où s’écoulent les mots venus de la complexité du cerveau, de nos connexions de neurones semblables aux constellations.
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Ensuite, c’est une articulation forte et délicate : c’est un des muscles les plus puissants du corps qui la met en action, afin que nous puissions et mordre et articuler les mots, tout en étant une articulation de petite taille.
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C’est une zone sensible : en ostéopathie, il est parfaitement reconnu que tout petit déséquilibre à ce niveau a des répercussions déterminantes sur l’équilibre de tout le corps.
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Elle nous rappelle le lien entre articuler les mots et mastiquer les aliments, puisqu’elle assure les deux fonctions… et nous rappelle donc une dimension souvent oubliée de la parole qui est de nous nourrir ! Et donc de récolter.
Renforcer le Fou et bénéficier de l’énergie de la saison
Globalement, le fou invite à lâcher, ne pas contrôler… alors juste faites-le… au fond il n’y a pas de recette pour laisser couler l’inspiration.
Vous pouvez écrire comme un flot, sans chercher à maîtriser le sens ni la cohérence, et ne lire ce que vous avez écrit que plus tard, vous pouvez dessiner en laissant les fils des formes et couleurs vous guider, vous pouvez chanter et danser…
Comme nous croyons vraiment en l’intelligence du corps, nous vous invitons à mettre cette poésie dans le corps, à la faire passer par lui. Amusez-vous :
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Jouez avec la mâchoire en faisant des sons et laissant les jambes danser librement avec ces sons et ces mouvements de mâchoire. Frappez le rythme avec vos mains.
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Cultivez votre capacité d’improvisation en osant danser sur votre propre voix ou sons lorsque vous êtes seul, dans la voiture ou dans la nature, sans musique par exemple. Ou bien chez vous en lâchant votre voix sur la musique qui vous guide.
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Chaque matin, avant de vous lever, ressentez quelle zone du corps attire votre attention, posez votre attention là, laissez se déployer l’imaginaire à partir des sensations… et écrivez une dizaine de lignes à partir de là… c’est votre corps qui vous parle !
Si vous voulez approfondir ce dialogue avec la poésie du corps, utilisez nos « Cartes du Corps », elles sont très utiles pour ouvrir les portes de notre poésie incarnée.
… et puis… sortez, c’est encore l’automne, regardez les arbres et la douceur du ciel qui tombe sur eux, laisser-vous rêver.
Nicolas BERNARD
dans cette vidéo, Nicolas vous partage autrement, avec poésie, sa perception de l’archétype du Fou :
c’est très beau, nos mâchoires sont un portail à traverser pour nous articuler dans notre chair.